Dès le confinement, beaucoup de managers se sont posé la question, à juste titre, de la cohésion et de l’implication des équipes : comment superviser et motiver dans ce contexte si particulier ?
En effet, les anciens modes de management ne fonctionnent plus. Les managers ont dû se réinventer. Pour surmonter cette période inédite, ils ont pu tester de nouvelles méthodes de management, et ainsi voir leur efficacité dans de nombreuses situations.
Désormais, l’empathie, l’accompagnement, la cohésion d’équipe et l’humilité sont les piliers d’un management qui fonctionne mieux et qui embarque les équipes vers plus d’engagement. Le « sur-contrôle » laisse place à la confiance, à la responsabilisation, et à l’autonomie.
Ces approches managériales, qui placent la dimension humaine au coeur de l’organisation, sont performantes tout le temps, et pas seulement en période de crise ou de changement.
Alors, que restera-t-il de ces pratiques ?
Un management de proximité
Pendant le confinement, l’engagement à souvent été fragilisé, à cause de l’isolement et de l’absence de contact social entre coéquipiers.
Face à cela, les managers ont dû se rapprocher de leurs équipes en multipliant les moments d’échanges. Une nouvelle attention à été portée au salarié, en tant qu’individu.
Ce progrès a permis de mieux s’adapter au contexte et attentes, spécifiques à chaque collaborateur éloigné.
Paradoxalement, certains managers n’auront jamais été aussi proches de leurs équipes qu’en période de travail à distance.
Cette proximité peut perdurer si le manager adopte définitivement cette nouvelle posture d’écoute et d’empathie dans son mode de communication.
Concrètement, c’est en laissant de côté ses préjugés, en posant des questions ouvertes, ou en reformulant sa compréhension des échanges, que le manager pourra instaurer un climat d’accueil et de confiance aidant les salariés à s’affirmer, et donc à s’engager.
Un management orienté résultats
Même quand ils étaient éloignés, les managers ont dû continuer à confier des objectifs à leurs collaborateurs. Cependant, ils ont dû le faire en leur laissant la liberté de travailler à leur façon, et quand ils le souhaitaient. Le seul contrôle portait donc sur le résultat, et non pas sur le temps de présence.
Une fois la crise passée, ce comportement a pour avantage de faire s’adapter le travail au mode de vie de chacun, et non pas l’inverse, si l’activité le permet.
Aussi, cela génère un sentiment de liberté auquel aspire beaucoup de salariés.
Or, il n’y a pas de liberté sans cadre. C’est pourquoi ce mode de management ne fonctionne pas sans des objectifs clairs, formulés de manière “SMARTE” – c’est à dire de manière Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste, inscrite dans le Temps, et Écologique.
Ainsi, pour responsabiliser les équipes il est important de définir les règles du jeu en amont : des critères d’évaluation transparents et partagés par tous.
Un management par le sens
Le sens est devenu un moteur de motivation non négligeable. La crise en a été le révélateur et l’accélérateur : de nombreux salariés se questionnent sur leur mission, leur rôle au sein de leur organisation.
Même si le sens que l’on donne à son travail doit venir principalement de soi-même, le manager peut accompagner chaque salarié à le trouver.
Les entretiens d’évaluation, les points de suivi, les échanges informels, sont autant d’occasions de percevoir ce qui motive, intrinsèquement, ses coéquipiers.
En aidant ses collaborateurs à découvrir leurs propres valeurs, forces, besoins, le manager peut confier des missions qui nourrissent leur identité. Résultat : une motivation plus naturelle, un engagement plus fort.
Autre source de sens, le projet de l’entreprise : on parle souvent des valeurs, de la mission, et de la vision.
Tout cela est écrit et communiqué aux salariés, mais n’est pas toujours vraiment incarné. Par exemple, les valeurs ne doivent pas seulement être affichées sur les murs des bureaux : elles doivent se vivre, se voir, dans les décisions, les comportements et les actions concrètes.
La période a été l’occasion pour beaucoup d’entreprises de réaffirmer leur projet, leur ADN.
Ainsi, les dirigeants et managers peuvent continuer à démontrer, au quotidien, que leurs choix sont guidés par une vision, une mission et des valeurs fortes. Sans cela : pas de cap, pas de fierté, pas d’engagement.
Un management participatif
Pendant cette période de crise, les managers ont largement associé les collaborateurs à la mise en place de nouvelles stratégies, notamment pour organiser le travail à distance.
Ces consultations ont eu pour effet de faire émerger de nouvelles solutions et de générer de la cohésion d’équipe.
Aussi, en participant à ces moments d’échange, les salariés ont encore plus le sentiment d’appartenir à un groupe et de travailler à un but commun.
Avec l’essor du télétravail, développer un esprit d’équipe deviendra l’une des tâches quotidiennes du manager. Même lorsque tout le monde travaillait dans un même espace, un simple séminaire annuel ne suffisait déjà pas.
La collaborativité doit s’inscrire désormais dans le quotidien, à travers de nouveaux rituels de réunion, guidés par des outils d’intelligence collective, tel que le co-développement.
L’opportunité d’ancrer de nouveaux modes de management
Les ajustements rapides qu’ont dû opérer les managers en cette période de crise soudaine auront finalement eu le mérite de faire se réinventer le management, et ce au profit de méthodes novatrices.
Cependant, ce changement ne pourra s’ancrer dans la culture managériale des entreprises que si leurs dirigeants décident de le faire perdurer.
C’est donc sur tout le système de formation des managers, de partage des connaissances, et de recrutement que les entreprises doivent mettre l’accent.
Ainsi, chaque organisation, chaque équipe, pourra devenir une entité apprenante, capable de s’adapter et de rebondir plus facilement face aux défis qui l’attendent.
Avant la crise du covid-19, le pourcentage de télétravailleurs était de 7% en France, alors que le taux moyen affiché par l’Europe était de 20%, et jusqu’à 35% dans les pays du Nord de l’Europe.
Depuis, « la plus grande expérience de télétravail au monde » (comme l’a récemment surnommée le magazine Time) est passée par là.
Comment ce changement a t-il été vécu, et que va-t-il en rester ?
Le télétravail : On aime un peu, beaucoup …pas du tout ?
Le confinement a rallié les entreprises au télétravail de façon brutale.
Nous sommes passés de 7% à 39% de télétravailleurs dans les entreprises de plus de 10 salariés, en l’espace de quelques jours, selon une enquête CSA pour Malakoff Humanis.
On aime…
38% des personnes interrogées estiment que le télétravail a un impact positif sur leur autonomie, leur responsabilisation, la gestion de leur temps et leur concentration.
En effet, ce nouveau mode de travail a comme avantage d’aplatir la hiérarchie et de développer un nouveau mode de management basé sur la confiance et orienté vers les résultats.
D’autres aspects pratiques intéressent certains : plus de temps perdu dans les transports ou dans les embouteillages !
De plus, lorsque les salariés ont la possibilité de s’isoler chez eux, ils constatent que leur concentration est meilleure car ils ne sont pas distraits ou interrompus par leurs collègues.
Finalement, pour l’entreprise, la productivité est meilleure, l’empreinte carbone réduite et il est même possible d’envisager des économies sur l’immobilier.
On aime moins…
Ce nouveau mode de travail présente certains dangers, notamment en ce qui concerne le sentiment d’appartenance et la cohésion des équipes, mais aussi en termes de risques psychosociaux (charge de travail, stress…).
Environ 30 % des salariés disent avoir vu leur santé psychologique se dégrader.
Certaines fonctions ne sont pas possibles en télétravail et un sentiment d’injustice peut naître chez ceux qui n’ont pas cette opportunité de gagner en qualité de vie.
Autre bémol : l’inégalité des conditions de travail. Plus de la moitié des télétravailleurs disent ne pas avoir bénéficié d’un accompagnement suffisant, 43% déclarent ne pas disposer d’un espace de travail adapté, et 48% être confrontés à des difficultés techniques.
Il n’y a plus d’unicité des conditions de travail puisque le lieu de travail devient son lieu personnel de vie. Il est donc difficile de faire un bilan de façon global car tout dépend de l’environnement personnel de chacun, et de la manière dont les salariés ont été accompagnés par leur entreprise. Chaque cas devient particulier et doit être géré différemment.
Retour à la normal : vraiment ?
Les entreprises constatent qu’un nombre important de salariés, dits « de bureau », ne veulent pas revenir. Ceux-ci ont découvert qu’ils travaillaient aussi bien chez eux, sans avoir à prendre les transports, et en subissant moins directement leur hiérarchie !
Tout processus de changement est difficile. Or, les salariés ont mis quelques semaines à trouver leurs marques dans ce nouveau mode de travail, en y trouvant des avantages. Désormais, on leur demande de revenir « à la normal » et c’est un nouveau changement pour eux, donc un nouveau processus difficile.
Aujourd’hui, Il semblerait que les entreprises envisagent d’évoluer en termes d’organisation et de management. Une majorité de DRH envisage d’augmenter le nombre de postes en télétravail. 8 sur 10 souhaitent voir pérenniser le travail à distance, en privilégiant un modèle mêlant présentiel et travail, selon un sondage réalisé par l’ANDRH et BCG.
Ce sondage met également en lumière le besoin de remodelage des pratiques managériales (pour 93 % des interrogés).
Management et télétravail : quels enjeux ?
En première ligne de ce changement de mode de travail, les managers ont un rôle clé à jouer auprès de leurs équipes.
Ils devront être encore plus attentifs aux particularités individuelles, à donner du sens et à fixer des objectifs clairs et atteignables. Ils vont pouvoir s’appuyer sur des méthodes agiles ou lean.
Ils vont devoir renforcer certaines soft skills comme l’écoute, l’empathie, la flexibilité, la communication.
Aussi, certains managers auront le sentiment de perdre le contrôle de leurs équipes éloignées. Pour combler ce manque, ils auront tendance à sur-contrôler le travail, au risque d’étouffer le salarié. L’enjeu sera de repérer ces pratiques contre-productives, pour aider les managers à acquérir de nouveaux réflexes plus performants.
L’accompagnement des managers ainsi que l’optimisation de l’organisation et des méthodes de travail vont devenir les priorités des entreprises.
Le juste équilibre
Le lien social est indispensable à notre équilibre. Après tout, comme Aristote l’avait déjà compris, l’être humain est un animal social.
C‘est la raison pour laquelle il n’est pas souhaitable de rester en télétravail tout le temps et en permanence.
Et en même temps, considérer que le télétravail est une simple parenthèse serait une erreur.
L’important est d’en tirer les bonnes leçons et ainsi trouver le bon équilibre. Combien de jours par semaine laisser les salariés en télétravail ? Quelles sont les fonctions qui s’y prêtent ? Comment mieux équiper les télétravailleurs chez eux ? Comment accompagner les managers qui doivent adapter leurs modes de fonctionnement ?